HISTOIRE DE LA CLASSE M

Le 26/07/2024

Dans le langage des marins

Tout au long des années 20 le club de Marblehead, dans le Massachusetts (côte Est des Etats Unis, à coté de Boston) fut un cas à part dans le cercle des voiliers modèles, puisqu’il était assez important (70 membres en 1930) pour soutenir ses propres classes. La classe locale la plus populaire était celle définie par l’architecte naval bien connu L. Francis Herreshoff : 450 pouces carrés de surface de voile et aucune autre restriction.

Naissance du Classe M

La classe 450, comme d’autres classes sans restriction, mène à des forme longues et élégantes avec des allongements extrêmes. Le plan ci-contre, dessiné par C.W. SWEET, montre un 450 typique : LWL 30.5inc, LOA 39, déplacement seulement 4.5 livres. En 1930 RoyClough, alors commodore du club, a proposé une nouvelle classe de bateaux plus grands. La première référence publiée que nous ayons est dans le N° de octobre/novembre 1930 de Model Yachting. La classe des 450 a été si populaire, avec tant de bateaux régatant à Marblehead, qu’une classe de bateaux plus grands a été créée. Ces bateaux doivent être de 50 pouces au pont. Au début on lui a proposé de porter 700 sq inc de voilure, mais après un essai à 795 il a été question d’augmenter la voilure jusqu’à 900 ou 1000 lors d’une réunion du club.

Le résultat, naturellement, fut que la surface de voile a été fixée à 800 sqinc et ainsi la classe la plus populaire de l’histoire de la voile modèle est née. Appelé indifféremment « Marblehead, » « 50/800, » ou classe « M », il y eut en peu de temps plus de 1000 bateaux enregistrés. La classe est devenue une classe nationale aux États-Unis en 1932 et une classe internationale en 1937. Il y avait beaucoup de raisons à sa popularité : la taille du bateau était bien adaptée pour la navigation dans toutes les conditions de vent et assez petite pour tenir sur la banquette arrière d’une voiture. La simplicité des règles contrastait avec les autres classes de l’époque, qui exigeaient beacoup de vérifications pour déterminer si un bateau était légal

Le classe M se développe rapidement aux USA et de nombreuses épreuves sont organisées sur la Côte Ouest, réunissant 50 à 60 bateaux. La classe est adoptée par l’AMYA, puis par la fédération allemande, qui organise en 1936 une régate de démonstration à la fin des JO de Berlin (10 pays étaient invités). Le Cheerio I de John Black remporte cette première course internationale de classe M.
La conception est intéressante parce qu’elle essaye de maximiser la longueur à la flottaison et de maintenir toujours une forme ressemblant à ses grands aînés.

Le Classe M et la voile libre

En 1937, à l’occasion du meeting de l’IMYRU à Fleetwood, le M est adopté comme classe Internationale. Le développement est relativement faible en Europe, seulement 100 bateaux enregistrés en UK en 1939, contre plus de 1000 aux USA.

Avant 1950, on a peu de renseignements sur le dessin des M, quelques plans ont été conservés, mais on n’est pas sûr que ce soit les dessins des bateaux les plus impliqués dans la compétition. La tendance générale des premiers M était une longueur à la flottaison de 40 pouces, largeur 9 et tirant d’eau 7, pour un lest de 9 livres et un déplacement de 13 à 16 livres, gréement de 60 pouces de hauteur et rapport foc/GV 25/75. Progressivement la longueur à la flottaison s’est allongée jusqu’à 49 pouces, largeur 12 pouces, déplacement dépassant 20 livres avec 77% de lest et un tirant d’eau à 13 pouces, tirant d’air 70 pouces. Tandis que la quille longue caractéristique des voiliers de l’époque se transforme progressivement en aileron plus fin bien que le lest reste intégré dans l’épaisseur de la quille. Cette période a également été marquée par l’apparition des gouvernails automatiques (vane) et des systèmes auto vireurs qui ont sensiblement modifié la pratique de la voile libre.

Après 1950, l’Europe essaie de rattraper son retard pris sur les Américain en raison de la guerre. L’apparition de voiles en tissus synthétiques à la place de la soie ou du coton, augmente de 15% l’efficacité des gréements et entraîne l’élargissement des carènes et une augmentation du déplacement pour assurer la stabilité dans la brise : déjà les problèmes d’enfournement au portant, d’autant qu’ en voile libre le spinnaker était autorisé. En dépit de l’adoption de forme planante, les déplacements restent très importants. Enfin, la fin des années 50 voit la naissance des coques en fibre de verre.

De 1960 à 1970 les quilles sont progressivement remplacées par des dérives avec bulbe, l’abaissement du lest permettant enfin de diminuer le déplacement et d’augmenter les hauteurs de mat pour le petit temps : 110 pouces (2794mm !!!) avec des mats alu haubanés. R Stollery affine l’utilisation de la fibre de verre et descend le poids des coques à 3 livres au lieu des 5 à 7 livres d’un bateau en bois. Pour s’adapter au vent il est utilisé jusqu’à 5 gréements maxis (800sqin) et des surfaces réduites. Ce n’est qu’en 1971 que les règles sont modifiées, limitant le nombre de gréement à 3 (avec 3 surfaces par gréements) et la hauteur du plus grand à 85 pouces (arrondi aujourd’hui à 2160mm). Les carènes évoluent pour suivre les formes planantes optimum et les francs-bords avant augmentent pour limiter l’enfournement au portant (6 pouces pour le Bloodaxe de RS).

Le premier et unique Championnat du Monde de M en voile libre a eu lieu à Fleetwood en 1975 avec 24 participants dont 21 anglais, les 3 « étrangers » finissant au 3 dernières places.

L’arrivée de la radiocommande

Le premier article décrivant un voilier radio commandé est daté du 10 sept 1934 dans le « Boston Traveler » (http://www.swcp.com/usvmyg/radio/radio.htm). Le voilier était contrôlé par un unique bouton poussoir qui agissait sur un sélecteur permettant d’actionner soit le treuil soit le servo de barre, une poussée incrémentait le sélecteur d’un cran , 2 poussées ramenaient le sélecteur au zéro.

Jusqu’en 1970 la radio commande était réservé au classe A en raison de son encombrement et du poids de ses batteries. A la fin des années 60, la démocratisation et l’amélioration des équipements radio ont permis de commencer leur installation sur des M en dépit d’un poids d’environ 1Kg dû principalement aux batteries et au winch.
La radiocommande a permis les courses en flottes autour de bouées en utilisant les règles de courses à la voile, mais elle a également profondément modifié la conception des bateaux. En effet, le bateau pouvant être manœuvré à volonté ne craint plus les contacts violents avec un concurrent ou ceux encore plus redoutables avec les berges du plan d’eau.

Dans un premier temps l’habileté du skipper à mener son bateau et à utiliser les règles a fait passer au second rang les qualités du voilier, ce qui heureusement n’a pas découragé les architectes qui ont continué à améliorer les carènes.

A partir de 1980, l’usage du carbone et du kevlar a permis de descendre le poids des coques en dessous d’une livre, voiles en mylar et mats en carbone : le bateau en ordre de marche pèse 10 à 12 livres (4,5 à 5,4 kg), pour 9 (4 kg) de lest.

Toutes ces améliorations, réduction du poids des coques, des gréements, des voiles et des radio, font que les M radio commandés sont beaucoup plus légers que les M voile libre et ont un rapport de lest plus faible (70%) mais sont plus raides à la toile en raison de l’augmentation importante de leur tirant d’eau.

L’évolution du Classe M en Allemagne et aux USA

Aux Etats-Unis et au Canada, l’influence des petits airs impose des surfaces mouillées minimaliste : bateaux étroits avec des sections très rondes, dérives profondes et petits lests. Ces dessins sont en fait annonciateurs de nos bateaux actuels.

En Allemagne, le devant de la scène est occupé par Lupart et ses Anja et Janus Walicki et ses Skalpel. Ils sont caractérisés par des formes peu profondes, des grandes dérives et des déplacements légers. Mais surtout ils sont dotés d’un accastillage remarquable de précision qui leur permet d’utiliser au mieux le moindre souffle d’air. On verra que les dessins de Walicki actuels ont évolué vers quelque chose qui ressemble beaucoup au Skinny de Johnson en1989.

L’évolution du Classe M en Angleterre et en France

Les premiers classes M Radio-Commandés sont des  » vane  » légèrement modifiés. En 1974 a lieu le premier championnat MYA, très peu des 27 participants sont dessinés pour la radio, mais ces déplacements légers l’emportent facilement.
La conception des bateaux est marquée par le climat anglais, assez venté. Ce qui amène les architectes a dessiner des bateaux à forme planante, bien équilibrés, avec un tirant d’eau et un lest important. De même pour compenser l’absence de spi, la taille des focs est augmentée.
Les dessins les plus marquant sont de Geoff Drapier (SailplaneII, Moonraker, RM1000), David Hollom (Ashanti), Chris Dicks( 247), Roger Stollery (Bee) et enfin Graham Bantock (No Secret, Paradox….)

A l’inverse, les Français, naviguant surtout sur des plans d’eau intérieurs en général peu ventés, utilisent des déplacements légers peu équilibrés. Le Flo-Flo, dessiné en 1975 par Grant, un Américain expatrié en France, devint fameux entre les mains de Pierre Jahan sous le nom de Concombre Masqué.

Le bateau déplaçait 12 livres (5,4 kg) dont 7 (3,2 kg) de lest pour un maître bau de 12 inches (30,5 cm) et était tellement instable qu’il fallait une position de pied de mat différent pour chacun des 3 gréements. Jahan en disait qu’il était si difficile à barrer que c’était un bon bateau pour apprendre.

Les bateaux de Jahan (Concombre Mk II, Duva et Déjah) et Paul Lucas (série des Cédar) étaient large, peu profond, légers et pas particulièrement bien équilibré mais efficace dans les petits airs. Les deux ont évolué vers une conception plus English (bateaux étroits, équilibrés et plus lesté) sous l’influence combinée des rencontres internationales et du développement des clubs sur le littoral avec des conditions de vent plus musclées qu’à l’intérieur. En 86 au CM de Fleetwood le Rajah et le Cédar Club font 1er et 2ème.

Le Présent et l’Avenir ?

Depuis de nombreuses années le Classe M est une classe active et innovante. L’utilisation des matériaux composites pour les coques, les gréements et les voiles sont choses courantes de nos jours et les plans des bateaux se diversifient avec l’arrivée de nombreux plans de passionnés qui naviguent sur leurs propres créations.

Prochaines régates

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